Une critique littéraire de l’œuvre «Le Guide du routard galactique»
Quoi de mieux pour nous dégripper les neurones que d’entamer un périple aux tréfonds de la Galaxie ? Pour moi, pas grand-chose. Et c’est pour cette raison qu’avant la sortie en salle de sa déclinaison cinématographique, j’ai mis la main sur la version française du célèbre « Hitchhickers’s Guide to the Galaxy ».
L’œuvre phare du Britannique Douglas Adams, acclamée partout sur la planète Geek, a d’abord été un feuilleton radiophonique diffusée sur les ondes de la BBC entre 1978 et 1980. Ce ne sera qu’en 1979 qu’Adams décidera de faire l’adaptation en romans du scripte radiophonique, laquelle lui permettra de rayonner sur le plan mondial.
L’aventure du Guide débute avec Arthur Accroc. Ce dernier vit modestement dans sa maisonnée située dans un petit village anglais. Alors qu’Arthur a toujours le peignoir sur le dos et la serviette de bain au cou, une équipe de démolition extraterrestre débarque pour détruire la planète. Après l’apocalypse s’en suit un déferlement de péripéties qui mèneront Arthur à faire moult rencontres fortuites et improbables. Accompagné par l’équipage du majestueux vaisseau spatial « le Cœur-en-or », Arthur parcourra l’Univers à la recherche de la réponse à « La vie, l’Univers et tout le reste », réponse pour laquelle il n’y a bizarrement pas de question. Sur son chemin, il fera petit à petit la paix avec sa nouvelle vie et découvrira les raisons mêmes de l’existence de sa feue planète natale.
Désormais classé culte, le Guide du routard galactique surprend d’abord par son humour intelligent et incisif. L’auteur présente la Terre en la décrivant dans son Guide comme étant « Globalement inoffensive », fait aussi étonnant qu’ironique, puisque le lecteur serait normalement en droit de s’attendre à ce que notre planète bleue soit présentée comme « menaçante et violente » ? Pas ici. Non, on décrit même le Soleil, astre auquel plusieurs peuples ont voué un culte pendant des millénaires, comme un « petit soleil jaunâtre et minable » : question de nous remettre les deux pieds sur terre…
Douglas réussi un véritable tour de force en parallélisant notre monde à celui d’un Univers déjanté, totalement drôlissime et absurde. Il dépeindra, entre autres, la flotte de démolition Vogon (responsable de la destruction de la Terre) comme étant menée par des créatures méthodiques, inflexibles, stupides, antipathiques et technocrates : une véritable copie carbone de notre système bureaucratique qui caractérise si bien notre civilisation « moderne ». Le lien fera rire jaune toute personne sensible à ce genre de comparaison. On se bidonne. Bref, c’est bien foutu.
Le périple sidéral d’Arthur n’est certainement pas l’accessoire d’un humour gratuit, mais permet au lecteur de porter un regard critique sur le monde qui l’entoure tout en mettant de l’avant l’infinie absurdité de l’univers (et de l’Univers). L’autodérision fait du bien et change de la vision glauque et violente que nous dépeignent la majorité des romans d’anticipation des dernières années.
Le Guide du routard galactique plaira aux férus de torture poétique, d’écrits encyclopédiques barjots et de voyages spatiaux à la vitesse de l’improbabilité. Certes, la lecture du récit se fait de manière fluide, mais sans pour autant tomber dans la facilité des longues descriptions interminables à la Verne : ce sont les dialogues qui sont à l’honneur, et avec raison ! Ceux-ci donnent énormément de rythme aux péripéties et on ne s’y ennuie pas. Nous sommes constamment dans l’attente du prochain commentaire comique, de la prochaine réplique songée ou encore du prochain mot-valise exquis. Lorsque le Président de la galaxie lâche un « Rien à branler de vos souris blanches », on ne peut que se sentir chez soi et qu’arborer un sourire.
Sans être inaccessible, au contraire, il serait faux de croire que le Guide du routard galactique sera une publication qui plaira à tous. Pour vraiment apprécier le roman, à l’instar d’autres tels que l’excellent Ready Player One de l’Américain Ernest Cline, il faudra un minimum de culture générale pour en capter toutes les références et les subtilités. Mais, amis lecteurs, il ne faudra pas, pour cette raison, bouder votre plaisir, car arriver à décrypter l’humour de l’auteur fait aussi partie de l’aventure de la lecture et ne devrait pas vous freiner pour autant !
Bref, Le Guide du routard galactique reste un incontournable de la littérature Sci-Fi britannique. Quiconque est intéressé par les récits humoristiques où aller manger un repas au «Dernier restaurant avant la fin du monde» est possible devrait au moins tenter le coup avec le premier tome de cette trilogie en cinq volumes. Ce livre est à mettre entre toutes les mains de ceux qui n’ont pas peur que l’on s’adresse à leur intellectualité.
François Deslauriers
Septembre 2019